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12.01. Babel - Chapitre XII et final (1/4)

lundi 14 avril 2008, par Luc de Bauprois


(Episode précédent)

Chapitre XII

Le petit groupe se rapprocha des deux corps inanimés, d’un pas nonchalant qui montrait leur certitude d’avoir mené à bien leur cruelle mission.

L’homme qui avait tiré fut le premier à atteindre l’endroit où les deux fuyards étaient tombés. Il resta un instant à contempler ses victimes. Comme les autres le rejoignaient, il lança un léger coup de pied dans les côtes d’Alain :

— Une bonne chose de faite, commença-t-il.

— Joli coup, renchérit quelqu’un.

— C’était facile, répondit-il avec une certaine fausse modestie.

— On en fait quoi ? demanda un autre en désignant les deux corps.

— On attend le chef de section. Je viens de l’appeler, répondit le dernier homme qui arrivait seulement. Il sera là dans cinq minutes…

Et désignant les deux personnes les plus proches de lui :

— Vous deux, allez donc chercher des brancards en attendant…

Obéissant sans discuter à l’ordre qui venait de leur être donné, ils quittèrent la pièce où ils revinrent quelques minutes plus tard, chargés des civières demandées, accompagnés d’un homme visiblement plus âgé qu’eux.

Vêtu d’une combinaison aux reflets argentés, sa physionomie dénotait une assurance certaine, fruit d’une longue expérience du commandement.

D’un geste négligeant il fit signe d’emmener Alain et Patricia, puis :

— Suivez-moi ! On emmène ce traître-là et sa poule chez le capitaine…

— Autant les balancer tout de suite, maugréa un des porteurs.

— Pas de discussion ! le coupa l’homme vêtu d’argent. J’ai des ordres.

Et, dans un murmure qui ne s’adressait qu’à lui-même, il ajouta :

— Pour une fois, je peux bien obéir à ce vieux fou de capitaine. Ça lui fera plaisir et il nous laissera peut-être enfin agir à notre guise…

La macabre procession s’ébranla et chemina lentement parmi le dédale de pièces et de couloirs vers lesquels Alain et Patricia avaient tenté de s’enfuir.

Ils s’arrêtèrent devant une grande porte métallique qui s’ouvrit lentement, obéissant servilement à l’apparition du chef de section.

C’était une nouvelle cabine d’ascenseur, mais plus vaste, beaucoup plus vaste que toutes les autres. Le groupe y pénétra et, toujours sans que leur chef n’ait à prononcer le moindre mot, elle s’ébranla et bondit vers le sommet de la tour.

Personne n’osait ouvrir la bouche. Pour la plupart d’entre eux, c’était la première fois qu’ils allaient approcher le capitaine. Ceux qui l’avaient déjà vu ne l’avaient jamais croisé que par hasard et en gardaient le souvenir d’un homme décidé, aux traits autoritaires, qui inspirait le respect et l’admiration.

On ne pouvait pas dire qu’il était craint. En fait, seuls les vingt chefs des vingt sections de la tour avaient affaire à lui et le commun des autres habitants ne recevait d’ordres que par leur intermédiaire. Le capitaine était devenu un mythe, une légende vivante qu’on chuchotait à mi-voix les soirs de veillée et à laquelle beaucoup commençaient à ne plus croire.

“Quel genre d’homme allaient-ils donc rencontrer ?” était la question que tous se posaient. Certains même se demandaient si c’était bien un homme vers lequel ils se dirigeaient.

Enfin la cabine s’arrêta avec douceur et ils entrèrent dans une pièce confortable, aux murs couverts de lambris en bois précieux, souvenirs des forêts d’une planète qui n’existait plus.

Derrière l’imposant bureau d’acajou rivé au plancher, un homme était assis. Il semblait fatigué, presque épuisé et son regard las affichait le douloureux deuil de la perte de ses illusions.

Ceux qui l’avaient déjà rencontré eurent du mal à le reconnaître. C’était bien le même homme, mais son ancienne prestance avait, semblait-il disparu. Il se leva lentement :

— Posez-les par terre, ordonna-t-il.

Il congédia d’un geste les quatre porteurs et attendit d’être seul avec le chef de section pour reprendre la parole :

— Pour une fois, vous suivez mes ordres…

L’autre ne desserra pas les dents. Faisant le tour de la table, le capitaine se rapprocha des civières.

— Mais, ce n’est pas Ingnam, constata-t-il en découvrant le visage d’Alain que le bureau lui avait jusqu’alors masqué.

L’autre se troubla un peu et perdit une partie de l’ascendant qu’il avait sur le vieil homme. Il tenta de se justifier :

— Pourtant ils m’ont dit…

Profitant de son avantage passager, le capitaine le coupa :

— Commencez donc par le début !

L’autre se ressaisit et commença son rapport :

— J’ai été appelé par la patrouille dix-huit. Le chef de groupe m’a signalé qu’un homme muni du disque d’identification d’Ingnam venait d’être repéré.

— Cela n’a pas de sens, Ingnam a été abattu, il y a déjà longtemps.

— Je le croyais aussi. Je me suis donc rendu sur les lieux et, suivant vos ordres, j’ai ramené les corps ici…

— Vous auriez quand même pu vous rendre compte que ce n’était pas ce traître, tonna le capitaine.

— Je ne l’avais jamais vu avant ! répliqua l’autre.

— Vous auriez dû ! Quand nous avons découvert qu’Ingnam était un espion nous avons diffusé un avis de recherche auprès de tous les chefs de section !

— J’étais à l’extérieur ce jour-là. Lorsque je suis revenu j’ai appris qu’il avait été tué au moment où il quittait le vaisseau.

— Mouais… en attendant, je veux savoir comment ces deux-là sont entrés !

— Bien capitaine, répondit l’autre qui avait perdu toute l’arrogance qu’il avait lors de son arrivée.

Resté seul, le capitaine se retourna vers Alain et Patricia. Il détailla leurs visages immobiles d’un air songeur, s’attardant particulièrement sur Patricia.

— Non, ce n’est pas possible, murmura-t-il avant de se détourner.

A suivre...


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